Un pilote de safari qui était très pressé...


avion selous 3827Février 2007. Nous rentrons de Selous (qui se prononce célou) vers Dar es Salam ! On nous appelle dans le 4x4 ou nous effectuons notre dernier (sniff !) safari. C'est que l'avion est en avance, nous avons même failli "le rater", si l'on peut dire. Nous aurait-il attendus jusqu'à l'heure prévue ? Sans doute... Euh, pas si sûr, Monsieur le pilote a l'air très très pressé ! Notre pilote pressé comme le lapin d'Alice aurait pu être un Héhé d'honneur, il est de petite taille et est aussi dynamique et rapide dans ses mouvements que nos amis quasi pygmées. Un Héhé qui se serait élevé au-dessus des autres ? Esthétiquement, pas de doute, je préfère la jolie jeune blonde pilote de l'aller à ce Monsieur du mauvais côté de la cinquantaine, gras du bide, grisonnant (mon portrait craché, mais de toute façon je me préférerais une jolie jeune blonde -la preuve, j'en ai épousé une alors que je ne me serais jamais épousé, d'autant que je prends toute la place dans le lit, je me serais disputé sans arrêt avec moi-même. Mais ma jeune jolie blonde était tolérante et a gardé, des lustres après, toutes ses qualités).

osQuelques os sur le bord de la piste de l'aéroport de brousse

Notre petit avion monomoteur est un gros dans sa catégorie, un Cessna de 20 places, on monte par une porte en queue d'avion, seul le pilote et le copilote (il n'y en a pas) ont une porte à l'avant. On charge rapidement nos bagages dans les soutes du zinc (on voit pourquoi les sacs souples sont conseillés : "no sharp edges".

avion bagage 8785

On décolle sans problème, le pilote connaît bien son avion, on reste à assez basse altitude car on se repose sur la piste d'un autre camps du Selous (prononcez Célou), atterrissage nominal ! Décollage du même métal, on se repose pour un deuxième arrêt au Selous (prononcez Célou) pour prendre une dernière fournée de passagers. Nous admirons le Selous (qui se pron OK j'arrête) verdoyant comme jamais, cette année 2007 a été très très arrosée, un parfait contraste avec 2006 om les hippopotames erraient sous le soleil à la recherche de nourriture et mouraient de faim en masse.

avion selous 8787

Selous (prononcer comme vous savez) vu du ciel

Et là, le big problème : les safaristes à rapatrier ne sont pas là ! Évidemment, vu l'avance sur l'horaire prévu, on ne peut leur en vouloir. Nous attendons dans la carlingue surchauffée, la clim s'arrête avec le moteur, le pilote lance des appels énervés dans sa radio. Il descend finalement et ouvre enfin les portes, un semblant d'air frais parcourt la cabine, ouf ! La jeep arrive enfin avec notre couple de retardataires, honte à eux, notre pilote récrimine en swahili auprès du chauffeur qui répond tout aussi véhémentement, on peut traduire facilement : "t'avais qu'à pas avoir une demie heure d'avance, banane toi-même, e tutti quanti - en swahili" . Les bagages sont chargés en soute, notre bon pilote, toujours pressé en bon lapin de pays merveilleux, remet le moteur en route, point mort, gaz à fond, on repart, l'avion prend de l'altitude. Au revoir Selous (prononcez Célou) ! nous reviendrons !

Pas mal de turbulences, comme au trajet Dar-Selous (prononcez Célou, c'est lourd, je sais, je le ferai plus) que nous avons effectué dans un mini monomoteur de 6 places (le pilote nous avait prévenus, le présentement nôtre ne nous a pipé mot). Plus même de turbulences d'ailleurs, ça secoue pas mal.

Tiens, à mi-trajet le pilote marmonne dans sa radio. Tout de suite l'esprit pas ranoiaque mais presque de ma blonde interprète ses chuchotis comme un kaddish (ou les sourates équivalentes en musulman, notre pilote ne faisant certainement pas partie de la tribu perdue éthiopienne, il est trop rond, trop petit), une prière des morts. A mon avis, il est en train de régler de l'avion les derniers préparatifs à son arrivée, pressé qu'il est de se présenter devant la Reine ou de prendre le thé avec Alice, ce doit être son jour de non anniversaire.

Nous approchons de Dar es Salam, toujours brassés par les courants aériens, on voit la piste, on va atterrir, tiens, on renonce. Enfin, ça, c'est ce qu’a compris ma blonde, toujours... mais presque, en fait il s'agit de la procédure normale pour s'assurer qu'il n'y a pas de girafes sur la piste, on ne la fait pas à un vieil Africain comme moi, qui de plus, faisait ses versions latines au bruit des T6 de la base 707 (mon père était aviateur à Marrakech. OK, pas de girafes mais pas mal de dromadaires). N'empêche ma blonde est inquiète même si elle cherche à ne pas trop le montrer.

Je lui prends la main et pour la taquiner, je lui montre la piste que nous voyons de nouveau après une large boucle. Pour la taquiner donc, je lui fais remarquer qu'une voiture de pompiers se met en route vers la piste d'atterrissage, toujours procédure normale, je le sais bien. Tiens, le Cessna arrive bien vite et bien cabré, légèrement de travers, curieux, procédure normale ? Pas le temps de se poser la question, nous avons atterri, l'avion ne rebondit pas plaqué qu'il est sur le tarmac, un freinage très énergique, un train de pneus sacrifié à l'impatience de notre lapin de pilote pressé (euh, l'inverse), il ne ralentit pas et effectue un énergique virage à 90 ° pour gagner le taxiway. Un attroupement à l’arrivée, des pompiers, on nous fait descendre sans attendre, pas question de récupérer nos bagages, on nous les amènera plus tard. Catherine, toujours pas … mais presque…, tient à les récupérer de suite, persuadée que l’avion peut exploser d’un instant à l’autre ! Amusé, je condescends à l’aider et nous récupérons nos Lowepro et notre sac de vêtements… Tout semble parfaitement dans le cadre de la procédure normale, du moins à mon œil expérimenté de rejeton nourri au lait des T6 et autres Fouga Magister de la base école aérienne 707 de Marrakech (ah bon, je vous en avais déjà causé...).

Ma blonde, moins au fait des choses aériennes, remarque le léger détail qui m’avait échappé.

On monte par l’arrière de l’avion, pour éviter que la carlingue ne soit ainsi déséquilibrée, une solide perche métallique de près de 2 m de long est fixée à la queue.

perche p 9655

la fameuse perche...

Dans sa précipitation, notre brave pilote pressé a oublié de la décrocher et de la ranger, s’est rendu compte tardivement des turbulences anormales (d'où les chuchotis) causées par le fort ballant en vol. La tour de contrôle a dû lui signaler la légère anomalie que constituait la perche battante (d’où remise des gaz et premier atterrissage avorté) avec fort risque de plantage à l’arrivée (d'où l’approche cabrée) ou risque plus faible d’incendie avec les étincelles sur la piste (d'où les pompiers, l’évacuation rapide).

Pressé, pressé, il n'a pas fait le tour réglementaire de l'avion à la deuxième escale au Selous (dont je ne vous donnerai pas la prononciation, je n'ai qu'une parole).

Même pas peur rétrospectivement… Ce que c’est d’être un expert en aéronautique !

avion PISTE selous 1000322

Piste d'atterrissage dans un parc (Katavi, en janvier 2007)